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Patrimoine

Curieux objets - Chez Ti-Père

27 janvier 2020

Texte de Jean Provencher

Savez-vous que la Ville de Québec possède une collection de plus de 15 000 objets? Chaque mois, découvrez un pan méconnu ou inusité de l’histoire de notre municipalité grâce à cette série de chroniques signées par l’historien Jean Provencher.

Chez Ti-Père, rue Sainte-Thérèse

La collection de la Ville de Québec peut nous proposer de beaux voyages. Comme c’est de saison, passons donc chez Ti-Père, surnom que se donne Lionel Faucher (1910-1990), originaire de l’île d’Orléans et mécanicien à l’emploi de la Ville. Par bonheur, la famille de monsieur Faucher a fait don de plusieurs pièces de monsieur Faucher liées à sa vie comme animateur de la rue Sainte-Thérèse en temps de carnaval.

Dès 1960, Lionel Faucher, Paul Frenette et Raymond Gariépy ont l’idée de construire des monuments de neige dans leur rue. « On était toujours en fête », dit Claire, l’épouse de Raymond Gariépy. « Il y avait un esprit spécial. On commençait un mois à l’avance. Tout en travaillant, on passait prendre un coup dans chaque maison… Quand les enfants étaient couchés, on allait aider les sculpteurs. On passait la nuit à charrier la neige, l’eau à la chaudière, avec des visites chez l’un et chez l’autre » [Le Soleil, 11 février 1960].

Lors de la dixième présentation du Carnaval, en 1964, les enfants de Lionel Faucher arrivent à le convaincre de transformer le sous-sol de la maison en une halte, un endroit où les sculpteurs peuvent se réunir et se réchauffer entre deux sessions de travail. Faucher accepte et y place un comptoir, un bar, quelques fauteuils et de longs bancs de bois contre les murs. Ainsi naît la Voûte Chez Ti-Père.

Bientôt, elles deviennent une véritable institution et on considère Faucher comme l’un des hôtes les plus pittoresques du Carnaval de Québec. Durant 25 ans, elles accueilleront les plus humbles comme certains des grands de ce monde. Plusieurs visiteurs seront intronisés à titre de membres de l’Ordre de Ti-Père. Et qu’importe votre statut, vous vous faisiez proposer un petit verre de caribou, une boisson portant un nom d’origine algonquienne, un mélange de vin rouge de type Porto et d’alcool. Le premier ministre québécois René Lévesque, Pierre-Elliott Trudeau en campagne électorale fédérale, et même la princesse Grace de Monaco prendront bien une lampée de caribou.

La rue du Carnaval disparaît au tournant des années 1990. De désaffection et non pas parce que les organisateurs du Carnaval en souhaitaient la fin. Les résidents se plaignent des inconvénients à habiter l’endroit en temps de carnaval. Le directeur général de cet événement, Jean Pelletier, affirme que « les gens de la place ont fait leur bout de chemin pour la rue Sainte-Thérèse et sont passés à autre chose. Souvent, maintenant, les sculpteurs viennent d’ailleurs. Faute de sel, les trottoirs sont glissants. La fin de semaine, la circulation automobile est interdite. » À l’été 1990, le décès de Lionel Faucher, excellent animateur de l’endroit, annonce la fin. En 1991, avec la fermeture de la Voûte Chez Ti-Père, toute activité carnavalesque cesse rue Sainte-Thérèse. Pendant une trentaine d’années, la rue Sainte-Thérèse aura été une visite obligée pour les carnavaleux.

La rue Sainte-Thérèse a porté diverses appellations depuis plus de 150 ans. Cette rue apparaît sur une carte de 1858 sous le nom de rue Geddès. Faisant partie de Boisseauville, elle va de l’actuelle rue de Carillon jusqu’à la rue Bayard. Sur une carte de 1875, voilà que la rue Geddès est devenue la rue Charlotte et une rue Sainte-Thérèse la prolonge jusqu’à l’actuelle rue Montmagny. Puis la rue Sainte-Thérèse tout entière sera celle aperçue sur les cartes en 1955.

Le 6 février 2006, dans le cadre de l’harmonisation des noms de rues rendue nécessaire par le regroupement municipal de 2002, la rue Sainte-Thérèse devient la rue Raoul-Jobin (1906-1974), du nom du célèbre ténor né dans le quartier de Saint-Sauveur.

Référence : Jean Provencher, Le Carnaval de Québec, La grande fête de l’hiver, Commission de la capitale nationale et Éditions MultiMondes, 2003.

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