L’art de renaître
Ce vaste édifice a longtemps abrité la manufacture de la Dominion Corset. Fondée en 1886, cette entreprise francophone a produit et exporté de la lingerie féminine sur le marché international pendant près de 100 ans. Son architecture recherchée lui a valu d’être considérée comme l’une des plus belles manufactures des Amériques. La Ville de Québec a misé gros pour la recycler et la mettre en valeur.
La Dominion Corset : une compagnie francophone
Georges-Élie Amyot fonde la manufacture de lingerie féminine Dominion Corset en 1886. Natif de la région de Québec, cet entrepreneur trentenaire a déjà pratiqué plusieurs métiers au Québec et aux États-Unis. Pour ce nouveau projet, il s’associe à Léon Dyonnet dont l’épouse tient une boutique de corsets.
La petite manufacture de corsets connaît des débuts prometteurs. En 1888, l’entreprise emploie une soixantaine d’ouvrières. Six ans plus tard, elles sont trois fois plus nombreuses. Amyot ouvre des points de vente à Montréal et à Toronto. La Dominion Corset prend rapidement de l’expansion.
La plus belle manufacture du continent
Amyot doit emménager dans de plus grands locaux. En 1897, il acquiert sur cet emplacement une ancienne manufacture de chaussures, qu’il agrandit dix ans plus tard.
À la suite d’un incendie qui endommage l’édifice en 1911, Amyot demande à Georges-Émile Tanguay de le transformer partiellement, en lui conservant son style victorien et son revêtement de brique. Le réputé architecte remplace la toiture mansardée par un quatrième étage, qu’il couvre d’un toit plat, et modifie la façade principale en y ajoutant de l’ornementation. Il inscrit aussi les fenêtres du rez-de-chaussée dans des arcs en plein cintre avec motifs décoratifs en brique. Il dote enfin la façade d’une tourelle carrée munie d’une horloge, qui fait écho à la tour de 15 mètres contenant le réservoir d’eau, au milieu du bâtiment. Le résultat vaudra au propriétaire et à l’architecte un concert d’éloges.
Les ouvrières de la Dominion Corset
La main-d’œuvre ouvrière de la Dominion Corset est essentiellement féminine. Alors que les emplois de dessinateurs, de publicitaires et de cadres supérieurs sont réservés aux hommes. Jusqu’à la fin des années 1950, l’entreprise n’engage en outre que des femmes célibataires. Celles qui se marient doivent quitter la compagnie.
Les centaines d’ouvrières touchent de maigres salaires et leurs conditions de travail sont difficiles : chaleur, poussière et vacarme des machines, éclairage insuffisant. Certaines sont payées à la quantité pour stimuler leur productivité.
Une entreprise familiale d’envergure internationale
Le succès de la Dominion Corset ne se dément pas après le décès de son fondateur en 1930. Sous la direction de son fils, la compagnie étend son réseau de distribution à l’Europe, aux États-Unis et à l’Amérique latine. Au début des années 1950, l’entreprise instaure le travail à la chaîne, plus profitable, quoique plus monotone pour les employées. La famille Amyot demeure aux commandes jusqu’en 1973. Elle cède alors l’entreprise à Canadelle WonderBra, qui transfèrera les opérations en périphérie de Québec en 1988.
L’édifice La Fabrique
Cet imposant édifice reste vacant pendant quelques années, en plein centre du quartier Saint-Roch en déclin. La Ville de Québec décide alors d’en faire un exemple de recyclage qui contribuera à la revitalisation du quartier.
Le nouvel édifice rebaptisé La Fabrique est restauré dans les années 1990 pour accueillir des bureaux de la Ville de Québec et l’École des arts visuels de l’Université Laval. L’ancienne cour intérieure est recouverte et une structure de métal y rappelle la vocation première des lieux. Une exposition permanente raconte également l’histoire de l’entreprise, entre autres par le biais de témoignages d’ouvrières. La qualité architecturale de cette manufacture du début du 20e siècle est préservée, ainsi que l’originalité de son parement de brique.
En démontrant le potentiel du patrimoine industriel désaffecté pour la relance du quartier Saint-Roch, la Ville de Québec a remporté son pari.
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Un bel espace de création, avec ses anciens murs de briques et ses grandes fenêtres ouvertes sur le quartier.
Voici un des principaux ateliers qui permettent aux étudiants de la Fabrique de développer leur art. Les machines qu'on y retrouve rappellent celles qui, à une époque, rythmaient la vie des ouvrières et des ouvriers de l'usine.
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