Un secret bien gardé
L’avenue du Parc-Beauvoir est tracée au tournant des années 1970 sur un terrain en pente qui offre de belles percées visuelles sur le Saint-Laurent. Elle se découvre à travers une végétation dense de boisés, d’arbustes et de parterres fleuris. Elle se démarque aussi par son architecture résolument moderne, qui couronne les milliers d’années d’occupation du site.
En terre autochtone
En 1854, un éboulement dans l’escarpement, au lieu-dit la Butte aux Sauvages, révèle des squelettes humains ainsi que des vestiges de wampum et d’ornements autochtones : le site semble être un ancien cimetière.
Des fouilles menées par l’archéologue Michel Gaumond, une centaine d’années plus tard, mettent au jour de nouvelles sépultures et des objets funéraires qui permettent d’associer le cimetière au 17e siècle, soit à l’époque de la mission jésuite de Sillery. On découvre également des éclats, des pointes de flèches, des grattoirs et des couteaux qui attestent d’une présence beaucoup plus ancienne. Il y a au moins 3 000 ans, des nomades campaient dans ce secteur, où ils fabriquaient des armes et des outils de pierre.
Un territoire agricole
En 1645, Nicolas Pinel cultive les terres de cette terrasse, en surplomb du Saint-Laurent, qu’on appelle alors le « Platon ». Trois ans plus tard, les Jésuites y font construire un moulin de pierre qu’ils afferment à des meuniers. Ce moulin apparaît sur un plan de 1685, de même qu’une tour de maçonnerie qui sert sans doute à protéger la mission jésuite des attaques des Haudenosaunee (Iroquois).
En 1970, on découvre les fondations du moulin entre deux propriétés, les 1569 et 1585, avenue du Parc-Beauvoir. Depuis, la Société d’histoire de Sillery a installé un panneau d’interprétation sur ce site.
À l’époque de la villa et du séminaire
Au 19e siècle, l’ancienne propriété des Jésuites est divisée et vendue à plusieurs grands propriétaires britanniques qui y aménagent des domaines. Le marchand de bois Richard Reid Dobell acquiert Beauvoir en 1867, dont il agrandit les limites pour englober presque tout le Platon. À cette époque, le domaine Beauvoir est principalement boisé. Ses terrasses naturelles se succèdent jusqu’à l’anse de Sillery, où Richard Dobell mène ses affaires.
Le domaine Beauvoir devient la propriété de la Société de Marie en 1929. Les Pères maristes aménagent un juvénat dans la villa Beauvoir. Puis ils construisent un nouveau bâtiment à l’est de la villa. À la fin des années 1940 et dans la décennie suivante, des surplus de terre provenant notamment de la construction du boulevard Laurier et des centres commerciaux de Sainte-Foy sont déversés en bordure de la falaise. On enterre ainsi les vestiges du cimetière autochtone sous plus de 22 mètres de terre.
Une avenue exceptionnelle
En 1966, les Pères maristes se départissent de l’ouest de leur propriété. On trace dans la nouvelle avenue du Parc-Beauvoir des lots adaptés à la topographie du terrain. Dix-huit maisons aux formes modernes y sont construites au cours des années 1970.
Ces maisons étagées dans la pente du terrain sont dessinées par des architectes de talent, dont Jacques Racicot, Ljubomir Lukic et Zbigniew Jarnuszkiewicz. On y remarque souvent une fenestration abondante, pour le contact avec la nature. Par leurs nouvelles formes, leurs matériaux, leur mobilier intégré, leurs espaces intérieurs et extérieurs atypiques, elles s’inscrivent dans des esthétiques d’avant-garde et représentent pour l’époque une nouvelle façon de penser les espaces de vie. Au 1521, par exemple, on trouve des aires ouvertes, un salon en paliers, des chambres au sous-sol et pour la chaleur qu’elles dégagent, des lattes de bois au plafond. Ces résidences permettent à une nouvelle génération d’architectes d’exprimer sa modernité.
L’avenue du Parc-Beauvoir est un secteur recherché de Sillery pour sa beauté, son environnement verdoyant et l’élégance de son architecture. Elle demeure l’un des secrets les mieux gardés du quartier.